Voyage au cœur de la conversion numérique / analogique

14 juin 2019

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Avec le développement de la musique dématérialisée, les convertisseurs sont devenus un élément à part entière d’un système haute fidélité. Un DAC permet de convertir le signal digital d’un ordinateur ou d’une source numérique en signal analogique compatible pour votre amplificateur préféré. Que se cache-t-il donc derrière ses trois lettres D.A.C  et quels sont les secrets de fabrication d’un bon convertisseur ? C’est à Yverdon, à une trentaine de kilomètres de Lausanne au bord du lac de Neuchâtel que la société Engineered s‘est installée depuis 2004, cette entreprise suisse est spécialisée dans l’ingénierie électronique. Lors du dernier salon High end de Munich, j’avais entamé une intéressante conversation avec Alexandre Lavanchy, administrateur de la société, cette semaine j’ai poursuivi pour vous ce passionnant dialogue, un voyage au cœur de la conversion numérique / analogique.


Alexandre Lavanchy

Quel est le rôle de votre société dans ce marché si particulier des convertisseurs ?

Engineered n’est pas à proprement parlé un fabricant de produits finis au même titre que les nombreux fabricants sur le marché même si nous commercialisons cependant quelques cartes et modules spécifiques « maison » qui sont dédiés à des audiophiles bricoleurs très expérimentés. Pour l’essentiel de notre activité, nous intervenons bien en amont auprès de marques haut de gamme qui ont besoin d’une expertise et d’un développement spécifique lors de la conception d’un produit.

Nous avons par exemple réalisé le développement et la fabrication de l’électronique de marques comme Illusonic ou Dartzeel. Nous avons collaboré aussi pour beaucoup d’autres marques haut de gamme, mais dont les contrats de confidentialité ne nous permettent pas de les citer.



Peut-être nous faut-il commencer par évoquer les puces de conversion et la question des couts, car il est parfois difficile de comprendre les très grandes différences de tarifs entre des convertisseurs qui embarquent parfois les mêmes puces de conversion, quel est votre avis sur cette question ?

Il existe de nombreuses références de puces sur le marché, mais contrairement à certains composants classiques, l’offre est tout de même assez limitée quand on vise des performances élevées. Par exemple, Texas instrument propose des puces très performantes à partir de 12 € environ. D’autres fabricants offrent des puces plus haut de gamme, tel que AKM et ESS, qui sont tarifées à 40 € environ, tandis qu’une puce Wolfson WM8740 qui est achetée en très grande quantité peut descendre à 3 € pièce environ. Mais il faut reconnaitre que la puce n’est pas l’élément le plus déterminant dans la qualité finale d’un DAC. La manière dont on va mettre en œuvre cette puce a un impact énorme, ainsi que les choix des composants périphériques. Comme pour toutes les électroniques haut de gamme, un bon DAC, c’est un ensemble de composants de grande qualité, un concept étudié et abouti, et au final du temps et de l’argent. La recherche et le développement et le « fine tuning » sont des éléments déterminants pour atteindre un niveau de qualité supérieure.


« UN BON DAC, C’EST DU TEMPS
ET DE L’ARGENT »


Quels sont donc selon vous les éléments les plus essentiels qui vont vraiment impacter la qualité d’un DAC ?

Les deux points qui me paraissent essentiels et sur lesquels il faut impérativement porter une attention particulière sont l’horloge et l’alimentation. La qualité du circuit analogique est aussi primordiale, car à l’instar des électroniques de tout ordre la qualité des composants et le soin apporté à leur intégration représentent des vraies valeurs ajoutées pour la qualité finale d’un appareil. Il y aussi une multitude d’autres points sensibles à ne pas négliger, par exemple la topologie générale des parties analogiques et numériques et leur organisation sur le circuit imprimé, la distribution des signaux d’horloge, le traitement du signal numérique en amont de la puce de conversion avec notamment la bonne gestion des flux et de l’échantillonnage, etc.


Pourriez-vous revenir un instant au rôle de l’horloge et à sa fonction principale ?

Faut-il d’abord rappeler que depuis la généralisation des entrées USB asynchrone, la majorité des dac fonctionnent dans un mode permettant d’être indépendant de l’horloge de l’ordinateur qui n’est absolument pas optimisée pour l’audio et qui génère de nombreuses perturbations. L’horloge est donc au cœur du système de reproduction numérique, et son rôle est précisément de cadencer le flux de transmission des données. Sa performance est essentielle, car le fonctionnement du DAC s’opère impérativement au rythme de l’horloge maîtresse et c’est incontestablement le point le plus important. Une horloge a aussi besoin d’une excellente alimentation et le moindre bruit sur l’alimentation se traduira inévitablement par une réduction directe de performance. Il faut aussi rappeler que les connectiques SPDIF ou AES/EBU ont un mode de fonctionnement différent, puisque l’horloge est transmise avec le signal. Ces interfaces doivent donc être traitées de manière différente si on veut les exploiter au mieux.

Il se trouve que la Suisse possède aussi une certaine expertise pour la conception d’horloges à quartz et nous avons aussi beaucoup de fabricants d’oscillateurs. Pour ma part, je continue de préférer la technologie des horloges à quartz. Les horloges atomiques n’ont à mon avis pas beaucoup d’intérêt : savoir que le tempo de la lecture des données numériques sera le même dans dix ans n’est pas très utile. En revanche, ces horloges atomiques sont généralement caractérisées par un bruit de phase important dans la bande audio, ce qui a un impact négatif sur la qualité de la conversion D/A.


Dans quelles mesures toutes ces étapes de conception et de modification sont elles mesurables ?

En ce qui concerne les interfaces numériques, l’essentiel de notre travail consiste à vérifier que les données audio du fichier de départ se retrouvent à l’arrivée sans dégradation, en parfaite synchronisation avec l’horloge maîtresse. Pour les circuits de conversion et les circuits analogiques, nous tentons au maximum de procéder à des mesures pour valider le bon fonctionnement des concepts. Les tests d’écoutes sont intéressants et indispensables, mais parfois perfectibles et nécessitent d’être corrélés avec un contrôle par mesure.


Compte tenu de l’évolution des puces de conversion, peut-on attendre de nouveaux progrès dans les années qui viennent et pourrait-on imaginer qu’un utilisateur puisse upgrader sa propre machine ?

Concernant votre dernier point, je pense sincèrement qu’un upgrade s’avère des plus délicat, voire franchement déconseillé, car l’organisation d’un dac avec une puce, une horloge et des circuits analogiques constitue une subtile association dont le réglage d’un élément est totalement dépendant de l’autre. Sur les évolutions possibles, je ne pense pas qu’il y aura de grands bouleversements dans les années qui viennent dans le domaine de conversion numérique, même s’il y a régulièrement de nouveaux concepts intéressants. En revanche il reste beaucoup de progrès à accomplir dans le domaine de la correction acoustique, nous avons eu aussi des collaborations très intéressantes et très prometteuses dans ce domaine, notamment avec la société Illusonic dont les produits apportent un réel renouveau dans le domaine des écoutes dans un cadre domestique.

 

 

 

 

 

 

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