La révolution tranquille

21 mai 2013

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En quelques années, Qobuz est devenu l’allié incontournable de tous les audiophiles et le premier fournisseur de musique en ligne haute définition. Conversation avec Yves Riesel, le patron de Qobuz, pour découvrir les cuisines de la musique en ligne en France de ces dernières années.

Yves Riesel travaille dans l’industrie du disque depuis 25 ans, patron du Label Abeille Musique, c’est depuis les années 2003 qu’il s’intéresse à la question de la musique à la demande. Lorsqu’il évoque son cœur de métier il parle de “patrimoine musical” avant de revenir sur ces dernières années avec l’élégance au passage de saluer son concurrent ITunes “qui a tout même ouvert la voie de la musique à la demande”. Lorsque j’évoque l’effondrement du marché du CD il ajoute tranquillement que ” c’était parfaitement prévisible, la durée de vie d’un produit industriel est d’environ 30 ans et nous sommes effectivement arrivés à son terme » et de rajouter “autant embrasser le changement plutôt que de le subir!”.

Depuis quelques années, le marché du disque a tenté d’anticiper ce changement avec des approches et des philosophies radicalement opposées selon les acteurs. Yves Riesel fait partie de ceux qui ont pensé qu’il fallait tirer le marché vers le haut en élevant les standards de qualité, qu’un très grand nombre d’amateurs de musique ne se satisferaient jamais des formats mp3 sur leur chaîne Hifi et qu’il fallait impérativement offrir au minima une qualité CD. Fort de ces constats, en compagnie d’Alexandre Leforestier, il lance Qobuz en 2007.

Un parcours semé d’embûches

En 2010 il s’insurge sur la “scandaleuse alliance d’Orange avec Deezer” avec une offre illimitée à quelques euros, Orange qui, se souvient –il, « a écrit à ses dizaines de millions d’abonnés pour dire que la musique, c’est gratuit ou ça ne coûte pas plus de 5 euros. C’était un message complètement désastreux ». Il est d’autant plus amer aujourd’hui que le français Deezer est passé son pavillon russe avec l’entrée au capital du milliardaire Len Blavatnik, “l’entrée de ce nouvel actionnaire signe l’échec du partenariat avec Orange qui revoit à présent sa participation à la baisse et dont la stratégie sur la musique en ligne reste pour le moins floue” ajoute t-il.

Son autre cheval de bataille, c’est la rémunération des artistes et des labels, il continue de dénoncer ces offres de musique en ligne bon marché précisément pour proposer de créer de la valeur plutôt que d’offrir des modèles totalement destructeurs pour la musique et pour la profession . Selon l’ADAMI (Organisation professionnelle qui gère le droit des artistes) une chanson achetée 1,29 € sur iTunes a rapporté 4 centimes d’euros à l’artiste et un titre écouté sur Deezer rapporterait à son auteur 0, 12 € centimes d’euros. Fort de son modèle économique, Qobuz annonce rémunérer les artistes et producteurs jusqu’à 30 fois plus, avec des abonnements à forte valeur ajoutée et un panachage abonnements/téléchargements.

yves rieselYves Riesel

Qobuz cultive ses différences et rencontre son public

Depuis son lancement Qobuz trace son sillon un catalogue de 17 millions de titres en « Vraie Qualité CD » 16 bits / 44.1 kHz ainsi que de 6.000 albums disponibles en qualité “Studio Master”, Qobuz revendique aujourd’hui plus de 100.000 clients. Une partie du catalogue est disponible au téléchargement en qualité Studio Masters 24 bits soit la meilleure qualité sonore perceptible par l’oreille humaine. Ici on écoute aussi de la musique de qualité sous forme d’abonnement, pour moins de 30 € par mois , on a donc accès à une gigantesque discothèque en qualité CD (pendant la durée de l’abonnement) . Si le catalogue est excellemment fourni, Yves Riesel reconnait tout même qu’il y a encore quelques rares récalcitrants parmi les labels qui ne souhaitent pas rendre disponibles les titres en streaming, c’est le cas d’ECM par exemple ( et à mon grand regret) mais d’ajouter aussitôt “que tous ces titres sont en revanche disponibles au téléchargement. Certains labels croient encore qu’ainsi ils préservent encore quelques ventes de CD, je pense que c’est un leurre au détriment d’une meilleure diffusion de la musique. C’est dommage, mais c’est leur droit le plus strict de refuser et nous n’y pouvons rien.”

Qobuz a eu aussi l’intelligence se différencier de ses concurrents par un contenu rédactionnel très riche et très diversifié, le site web est aussi une belle plateforme d’information où toutes les musiques ont leurs places, on y trouve des blogs spécialisés, des boutiques en ligne animées par des disquaires, des interviews, des podcasts et même une rubrique Hifi. Qobuz est devenu une formidable passerelle pour tous les curieux. Votre serviteur en fait chaque jour l’expérience, Qobuz est un outil simple pour aller à la rencontre de musiques et d’artistes qui n’appartiennent pas nécessairement à sa propre culture musicale. Enfin Qobuz a fait le choix aussi de ne pas se “limiter” à la seule production discographique pour relayer activement l’actualité des concerts en proposant de temps à autres des retransmissions de concerts “live” en haute qualité.

qobuz munichUne bannière Qobuz au dernier salon de Munich

A la conquête du monde

Aujourd’hui Qobuz se développe et à l’instar de services déjà disponible en Suisse et en Belgique, des implantations sont prévues en Allemagne, au Royaume Uni, en Scandinavie et plus tard aux Etats Unis. Si Qobuz est un site web disponible partout dans le monde, l’accès aux services sont limités aux pays concernés.Yves Riesel rappelle en effet que “les droits relatifs à la musique eux sont bien négociés dans chaque pays” et de conclure « si la musique est certes universelle, sa perception et les usages selon les pays sont très différents . Ici on s’adresse à des nouveaux marchés avec la volonté de proposer une approche éditoriale qui ait du sens, pour ce faire, nous apprenons beaucoup et c’est passionnant ». Parions que cette offre de qualité saura séduire ailleurs, c’est aussi une question de survie pour tous les artistes et les labels partout dans le monde et l’un des garants de la diversité musicale .

Dans un deuxième article, je reviendrai sur le fonctionnement de Qobuz et sur les aspects plus techniques.

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Une Réponse à “La révolution tranquille”

  1. Bel éloge de Qobuz,et de la dématérialisation….Quand à moi laissez moi préférer encore mon disquaire et mes bons “vieux” CD qui devaient “enterrer” il y a 30 ans le valeureux vinyl, qui est toujours la !! Étonnant non ?…
    Quant à la qualité annonce comme supérieure de la dématérialisation sur le CD, on nous prêchait le même refrain entre CD et vinyle. Personnellement je n’en suis, actuellement, nullement convaincu…..!

    Bien Cordialement,
    C’Jausserand

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